Origine des atmosphères des planètes telluriques

Plus près du Soleil, les planètes telluriques se sont formées à partir de la coalescence des grains réfractaires, mais n'ont pas atteint la masse suffisante pour capturer du gaz à partir de la nébuleuse proto-solaire. Il n'est pas complètement exclu que les planètes telluriques aient pu pendant la phase initiale de leur formation accréter un peu de gaz proto-solaire, mais si c'est le cas, cette atmosphère n'a pu être retenue longtemps, à cause d'une part de la faible gravité de ces planètes, et d'autre part du puissant flux de particules (« vent solaire ») et de l'intense rayonnement UV du soleil jeune, qui ont balayé la nébuleuse primitive environ 10 millions d'années après la formation du Soleil. Une preuve expérimentale du fait que les atmosphères des planètes telluriques ne sont pas « primitives » est donnée par la mesure de l'abondance des gaz rares (hélium, néon, argon, xénon, krypton). Ceux-ci sont chimiquement inertes et n'ont donc pas évolué depuis la formation des planètes ; pourtant dans les atmosphères des planètes telluriques ils sont de plusieurs ordres de grandeur moins abondants que dans le Soleil ou dans Jupiter, ce qui démontre une origine différente.

Origine des atmosphères secondaires


Origine des atmosphères secondaires. Les planètes telluriques en formation ont pu accréter des gaz légers comme l'hydrogène et l'hélium, mais ceux-ci ont rapidement disparu, s'échappant dans l'espace ou étant balayés par un bombardement intense de particules et de photons en provenance du Soleil jeune. Les atmosphères actuelles, dites secondaires, ont pu prendre leur source dans un flux de comètes riches en glaces, ainsi que dans le dégazage d'éléments volatils piégés dans les grains ayant formé les planètes.
Crédits:
Raphaël Moreno et Gilles Bessou / Observatoire de Paris

Les atmosphères des planètes telluriques ont donc nécessairement une origine « secondaire ». On peut envisager deux sources d'atmosphères secondaires. D'une part, une origine interne, qu'on nomme « dégazage ». Ce terme désigne l'évacuation de volatils piégés dans les grains rocheux qui ont formé les noyaux planétaires. Le dégazage se manifeste de nos jours sous la forme d'éruptions volcaniques, qui injectent dans l'atmosphère des espèces comme l'azote, le méthane, le dioxyde de soufre, etc… Il a dû être particulièrement important au début de l'histoire des planètes telluriques, en raison de la quantité de chaleur engendrée par l'accrétion planétaire, et on peut imaginer que la Terre jeune était le siège de gigantesques éruptions volcaniques. D'autre part, les atmosphères secondaires peuvent avoir une origine externe. Des petits corps tels qu'astéroïdes et comètes ont percuté les planètes, surtout au début de leur histoire (comme en témoigne la cratérisation des surfaces planétaires et sa datation), et ont ainsi pu enrichir leurs atmosphères en éléments volatils. Les comètes, en particulier, sont riches en glaces de toutes sortes (H2O, CO2, CO, N2, CH4, et en une quantité de molécules organiques), et ont très probablement contribué à la formation de l'atmosphère de la Terre. Il a même été envisagé que les océans terrestres puissent provenir de l'eau contenue dans les comètes, mais cette explication ne peut être que partielle, car le rapport d'abondance entre le deutérium et l'hydrogène (D/H) dans les comètes est 2 fois plus élevé qu'il ne l'est dans les océans. Le rôle des comètes en tant que source de molécules pour les atmosphères planétaires a néanmoins été démontré de manière spectaculaire en 1994, lorsque la comète Shoemaker-Levy 9 a percuté Jupiter et déposé un certain nombre d'espèces chimiques (HCN, CS par exemple) qui n'y étaient pas présents auparavant. Le vent solaire est également une source mineure d'atmosphère, implantant en particulier des gaz rares dans les surfaces des planètes telluriques, espèces que l'on retrouve dans leurs atmosphères.

Crédits: Emmanuel Lellouch - Observatoire de Paris