Un exemple de gestion des milieux côtiers, le bassin versant de la baie de Caraquet (Nouveau-Brunswick, Canada) : thème, acteurs et enjeux de gouvernance rencontrés dans le milieu aquatique
Située dans le nord-est du Nouveau-Brunswick sur la côte est du Canada, le territoire qui fait l’objet du présent exemple couvre la baie de Caraquet et son bassin versant (plus d’information ainsi que différentes cartes et données sont disponibles sur le site http://www.baiedecaraquet.com). Ce territoire comprend 3 rivières, dont la rivière Caraquet et les 12 ruisseaux qui s’y déversent et couvre les villes dont les activités ont un impact environnemental sur la baie de Caraquet et son bassin versant. Sur ce territoire, se trouvent la ville de Caraquet, les villages de Maisonnette, Saint-Léolin, Bertrand et Bas-Caraquet, de même que 3 districts de services locaux, à savoir Village-des-Poiriers, Dugas et Pokesudie. La limite du territoire maritime est définie par le territoire de pêche des différentes flottilles présentes. La population du bassin versant compte un peu plus de 15.000 habitants, sa superficie couvre 420 km2.
Vue sur le port et la baie de Caraquet
Du point de vue de la pêche et de l’aquaculture 3 thèmes sont rencontrés :
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Conflits d’usage observés ou potentiels :
ces conflits sont liés au partage des ressources spatiales et des ressources halieutiques. Ce thème implique les acteurs suivants : aquaculteurs, pêcheurs à pied, pêcheurs côtiers, pêcheurs semi-hauturiers, ministères provinciaux et fédéraux ayant les pêches et l’aquaculture dans leur mandat. Les risques perçus sont liés à l’escalade de ces conflits qui ont pris par le passé des tours relativement violents ayant requis l’intervention des forces de l’ordre. Les enjeux de gouvernance associés à ce thème sont ceux, assez traditionnels, de répartition d’un bien commun ainsi que la mise en œuvre de mécanismes de partage ou de prise de décision permettant d’éviter la polarisation et l’escalade des conflits. La perception de ces risques est exacerbée par les inquiétudes quant aux stocks des différentes espèces débarquées à Caraquet.
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Qualité de l’eau de la baie :
cette qualité est affectée par la présence de coliformes fécaux, présence ayant justifié la fermeture pour la récolte des bancs et de baux ostréicoles, en outre la présence de matière organique en suspension fait également l’objet d’inquiétudes. Ce thème implique les acteurs suivants : pêcheurs à pied et aquaculteurs -- première personnes touchées par la qualité de l’eau de la baie -- ainsi que les acteurs identifiés comme responsables potentiels ou réels des contaminations par coliformes fécaux ou par matière organique -- à savoir les propriétaires de résidences secondaires dont les fosses septiques sont déficientes, les exploitants de terres agricoles épandant du fumier ou du lisier sur leurs champs, les exploitants forestiers ainsi que les exploitants de tourbières – et finalement les agences des différents paliers de gouvernement chargés de la réglementation des activités en question. Les risques perçus dans ce cadre sont ceux associés aux pertes économiques liées à la fermeture des bancs et baux aquacoles que ce soit pour des raisons de santé publique ou pour des raisons de baisse de productivité. Les enjeux de gouvernance liés à ce thème touchent la question du respect des réglementations existantes portant sur les eaux usées et les coupes forestières ainsi que sur la mobilisation de moyens financiers publics destinés à permettre aux industries présentes d’opérer en étant moins dommageables.
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Protection physique de la baie :
la baie de Caraquet est actuellement protégée par une flèche dunaire (Dune de Maisonnette). Cette flèche dunaire limite les échanges d’eau entre la baie et le Golfe du Saint-Laurent ce qui vient en modifier la salinité et la température, ces deux éléments expliquant la productivité élevée de la baie de Caraquet. Néanmoins cette dune est depuis quelques années traversée par une brèche et de fortes inquiétudes sont exprimées quant à sa pérennité. Il s’agit d’un thème important pour les aquaculteurs, les pêcheurs à pied et les pêcheurs côtiers et qui implique les agences gouvernementales provinciales et fédérales. L’enjeu de gouvernance associé à ce risque est lié à la compréhension du caractère éphémère des flèches dunaires, caractère qui ne doit pas être exacerbé par des travaux éventuels en amont de la dérive littorale.
Jean-Paul VANDERLINDEN, professeur associé à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines