Comment le changement climatique du XXème siècle se compare-t-il au climat des derniers 2000 ans ?

Il est très probable que l’augmentation du CO2 et du forçage radiatif dû à l’effet combiné des augmentations de concentration de CO2, CH4 et N2O ont été au moins 5 fois plus rapides pendant la période 1960-1999 que pendant tout autre période de 40 ans au cours des derniers deux millénaires précédent la période industrielle.

Les mesures effectuées sur les carottes de glace du Groenland et des moyennes latitudes de l’hémisphère nord montrent avec un très bon indice de confiance une augmentation rapide post-industrielle des concentrations de sulfates au-dessus du niveau pré-industriel.

Certaines des études conduites depuis le Troisième Rapport de Synthèse (TAR, pour Third Assessment Report) indiquent une variabilité de la température de l’hémisphère nord à l’échelle de plusieurs siècles supérieure à celle qui était publiée dans le TAR. Ces travaux montrent que les reconstructions sont sensibles aux types d’indicateurs paléoclimatiques utilisés, aux méthodes statistiques mises en œuvre pour la calibration et la combinaison des données afin de reconstruire les températures passées. La plus grande variabilité démontrée par certaines études récentes concerne principalement des températures plus fraîches (surtout pour les périodes du XIIème au XIVème et du XVIIème au XIXème siècles). Seule l’une des nouvelles reconstructions indique des températures légèrement plus chaudes (au XIème siècle, mais toujours dans la gamme d’incertitude publiée dans le TAR).

Le TAR a souligné le réchauffement exceptionnel de la fin du XXème siècle par rapport au dernier millénaire. Les travaux récents ont renforcé cette conclusion. Il est très probable que la moyenne des températures de l’hémisphère nord ait été plus chaude pendant la seconde moitié du XXème siècle que pendant tout autre intervalle de 50 ans au cours des derniers 500 ans. Il est également probable que cette période de 50 ans a été la plus chaude dans l’hémisphère nord au cours des derniers 1,3 ka, et que ce réchauffement a été plus étendu spatialement que pendant toute autre période de 50 ans des derniers 1,3ka. Ces conclusions sont plus fiables pour les températures d’été des zones continentales extra-tropicales, et pour les périodes les plus récentes, à cause de la faible densité de reconstructions pour les périodes plus anciennes.

Les faibles variations des concentrations pré-industrielles en CO2 et CH4 au cours du dernier millénaire sont cohérentes avec les reconstructions des températures de l’hémisphère nord ; des variations climatiques plus intenses que celles qui sont reconstruites impliqueraient probablement des variations plus marquées de ces concentrations. Les variations faibles des gaz à effet de serre au cours de la période pré-industrielle fournissent ainsi une preuve indirecte que les variations de la température globale ont été limitées à l’échelle de la décennie et du siècle.

Les simulations paléoclimatiques sont globalement cohérentes avec les reconstructions des températures de l’hémisphère nord au cours du dernier millénaire. L’augmentation des températures de surface depuis 1950 ne peut être simulée sans prendre en compte les gaz à effet de serre d’origine anthropique parmi les forçages climatiques (très bon niveau de confiance) et il est très improbable que ce réchauffement ne soit que la fin d’un épisode froid qui a précédé le XXème siècle.

La compréhension de la variabilité climatique du dernier millénaire dans l’hémisphère sud et les tropiques reste très limitée à cause de la faible densité d’enregistrements paléoclimatiques.

Les reconstructions climatiques du dernier millénaire indiquent que les téléconnections spatiales associées à l’Oscillation Australe / El Niño ont varié davantage que ne le montrent les mesures instrumentales du XXème siècle (haut niveau de confiance).

Les enregistrements paléoclimatiques de l’Afrique du nord et de l’est et des Amériques indiquent que l’occurrence de sécheresses persistantes pendant plusieurs décennies ou davantage est une caractéristique du climat de ces régions au cours des deux derniers millénaires.

complement Complément

Traduction du chapitre 6 du 4e rapport de synthèse du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC), effectuée par Valérie Masson-Delmotte (Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, CEA-CNRS-UVSQ, Gif-sur-Yvette, France) le 28 mai 2007.
Document complet à télécharger (LIEN)

remarque Remarque

  • Le document en anglais, résumé pour décideurs, chapitres complets du Working Group I (Physique du Climat) au 4ème rapport de synthèse (Fourth Assessment Report) et glossaire sont disponibles sur : ipcc-wg1.ucar.edu/. (LIEN)
  • Le troisième rapport de synthèse (TAR, Third Assessment Report) disponible intégralement en anglais sur : ipcc.ch (LIEN)
  • Les acronymes anglais ont été systématiquement utilisés avec mention des termes complets et de leur traduction en français.
  • La notation « ka » (pour « kilo années », milliers d’années) a été utilisée aussi bien pour la durée de périodes passées que pour la date de certains évènements (par exemple, 8,2 ka représente la période 8200 ans avant la période de référence actuelle, par convention 1950 AD).
Crédits: Valérie Masson-Delmotte - IPSL-LSCE