La contamination des eaux par les pesticides : un problème de risque

La question de la contamination des eaux par les pesticides relève d'une problématique de risque. En effet, le fait de traiter une parcelle avec des produits phytosanitaires dans les conditions ad hoc, n'entraîne pas inexorablement qu'une partie des matières actives apportées soient entraînées dans l'eau vers le réseau hydrographique et/ou les nappes. Si l'on prend l'exemple de l'atrazine (désherbant du maïs interdit en France depuis plusieurs années), même si c'est l'un des produits que l'on trouvait – avant son interdiction - le plus souvent et aux plus fortes concentrations dans l'eau, toutes les parcelles qui recevaient ce type de désherbage ne perdaient pas d'atrazine. Aux doses pratiquées dans les années qui ont précédé l'interdiction de ce produit en France, soit aux alentours de 1 kg de matière active par hectare, des parcelles que l'on peut appeler « parcellles à risque » étaient susceptibles de perdre une partie (une petite partie) de la quantité de matière active apportée. Dans les études sur les pesticides, on spécifie souvent les doses apportées en matière active pour bien faire la distinction entre le produit commercial et la matière active qui est le plus souvent diluée par des adjuvants et des solvants dans les produits commerciaux. Ainsi par exemple l'atrazine était le plus souvent diluée à 50% dans les produits commerciaux comme aujourd'hui le glyphosate est le plus souvent dosé à 360 g/l dans les produits commerciaux concentrés à base de glyphosate.

Les pertes de pesticides provenant des « parcelles à risque » sont le plus souvent faibles de l'ordre du gramme par hectare (de quelques dizaines de grammes par hectare dans les cas les plus problématiques à quelques décigrammes dans les cas les moins problématiques). La plupart du temps des pertes de quelques décigrammes ou de quelques grammes suffisent à atteindre ou dépasser les seuils que l'on doit respecter pour les eaux potables dans les pays d'Europe occidentale. C'est ce qu'on peut appeler la « règle du 1% ou du 1%0 ». Cette règle peut être expliquée simplement par l'exemple suivant : supposons une parcelle qui reçoive 1000 g/ha de matière active et qui perde soit 1%, c'est-à-dire 10g ou 1%0, c'est-à-dire 1g par hectare de matière active. Supposons que cette parcelle soit dans une région qui reçoive annuellement 750 mm de précipitations dont 200 mm de pluies efficaces (part des précipitations qui contribue à l'alimentation des nappes et du réseau hydrographique) et supposons que la quantité de pesticides entraînée en dehors de la parcelle soit diluée dans la totalité du volume annuel de pluies efficaces on atteindrait alors :

Ce petit calcul élémentaire démontre bien que l'entraînement d'une part infime de la quantité de matière active apportée suffit pour atteindre ou dépasser le seuil de 0,1 mg/l.
Ce risque de transfert dépend d'un certain nombre de facteurs qu'on appelle « facteurs de risque ».
Dans une étape ultérieure il faudra établir la liste de ces facteurs de risque.

Crédits: Pierre AROUSSEAU, professeur à Agrocampus Rennes