Les nuées ardentes

Un lahar est un mélange de débris et d'eau s'écoulant à vitesse rapide sur un volcan et son piémont.

1. Origine des lahars

Les lahars syn-éruptifs, qui se produisent pendant une éruption, sont aussi appelés lahars primaires ou lahars chauds (Lavigne et Thouret, 2000). Ceux qui se forment par la fonte brutale de la neige ou de la glace comptent parmi les plus dangereux car ils sont très volumineux, même pour une éruption modeste : celle du Nevado del Ruiz en 1985 a fait 25 000 morts alors que seulement 9 % de la calotte glaciaire a fondu. D’autres lahars résultent de la pénétration d’une nuée ardente dans une rivière, de la vidange brutale d'un lac de cratère après une explosion, une brèche dans la paroi du cratère ou un débordement quand le lac est trop plein. Enfin, des pluies de très forte intensité pendant une éruption peuvent aussi générer des lahars primaires, comme ce fut le cas au Pinatubo où un cyclone traversa la région affectée par l’éruption. Les lahars post-éruptifs ou secondaires ou froids, remanient les dépôts de cendres ou de nuées ardentes fraîchement déposés, alors que les lahars non-éruptifs se produisent en l’absence de tout phénomène éruptif (Lavigne et Thouret, 2000).

2. Dynamique des lahars

A la différence d’un cours d’eau classique, un lahar transporte une grosse quantité de sédiments. Si celle-ci excède 20 % du volume total de l’écoulement, ce dernier est qualifié d’hyperconcentré ; si cette proportion dépasse les 60%, on parle alors de coulée de débris. Les lahars peuvent aussi prendre la forme de coulées de boue si leur proportion d’argile est forte. Les mécanismes d’écoulement des lahars sont originaux : les coulée de débris s’écoulent par pulsation (Fig. 5), leur vitesse, leur débit et leur capacité de transport étant très supérieurs à ceux des écoulements fluviatiles. Des blocs de plusieurs tonnes peuvent ainsi flotter à la surface du lahar. L’élément le plus original de ce type d’écoulement est la présence d’un front pierreux, très pauvre en eau, qui se déplace en raclant le fond du chenal tel un bulldozer (Fig. 6).

Pulsation d’un lahar au Pinatubo en juillet 1994

Le débit a été multiplié par 10 entre les deux clichés espacés de cinq minutes
Crédits: Cliché : F. Lavigne

Front d’un lahar du Semeru le 22 janvier 2002

Sa hauteur faisait 4,5 m pour un débit proche de 550 m3/s. La taille des plus gros blocs est de 2 m
Crédits: Cliché : F. Lavigne

3. Risques associés aux lahars

Le plus grand danger provient du fait que les lahars ne suivent pas obligatoirement les cours d’eau, mais débordent fréquemment en dévastant tout sur leur passage. On se souvient des images télévisées de 1985 montrant la ville d’Armeiro dévastée par un lahar du Nevado del Ruiz en Colombie qui fit 23 000 victimes. Cette catastrophe éleva le nombre de victimes des lahars au XXe siècle à 31 500 victimes, soit 40% des victimes d’éruptions volcaniques. En termes de dégâts matériels, les lahars du Pinatubo (Philippines) ont battu tous les records avec plus de 1000 km² recouverts par leurs dépôts et des pertes estimées à 500 000 dollars US.
La prévention des risques est d'abord fondée sur le zonage des lahars à l’échelle du volcan et si possible de la vallée. Au Nevado del Ruiz, une carte des zones menacées avait été dressée juste avant la catastrophe, mais son manque de clarté et des contradictions entre scientifiques l’ont rendue peu crédibles auprès des autorités. Ces dernières ont attendu le dernier moment pour déclencher l’alerte, qui fut en outre ralentie par d’autres facteurs comme le mauvais temps, l’heure tardive et un match de football important à la télévision !
Hormis la cartographie de l’aléa, des moyens techniques peuvent aider à la prévention des risques : certains volcans sont équipés de détecteurs qui envoient un signal sismique ou acoustique au passage d’un lahar ; de gros barrages d’origine japonaise appelés Sabo dams piègent une partie des matériaux solides transportés et diminuent la vitesse de l’écoulement.

Crédits:
Franck LAVIGNE, Maître de Conférence à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne