Economie sociale et solidaire : les « nouveaux services »*

Économie solidaire et développement durable apparaissent souvent comme deux notions proches mais dont les points de rencontre sont souvent peu mis en évidence.

définition Définition

Économie solidaire :« Composante spécifique de l’économie aux côtés des sphères publique et marchande, l’économie solidaire peut être définie comme l’ensemble des activités économiques soumis à la volonté d’un agir démocratique où les rapports sociaux de solidarité priment sur l’intérêt individuel ou le profit matériel ; elle contribue ainsi à la démocratisation de l’économie à partir d'engagements citoyens. Cette perspective a pour caractéristique d’aborder ces activités, non par leur statut (associatif, coopératif, mutualiste,…), mais par leur double dimension, économique et politique, qui leur confèrent leur originalité. » (Eme et Laville, 2006, p. 302)

Le développement durable, quant à lui, « appelle la mise en œuvre d’une double solidarité : “horizontale” à l’égard des plus démunis du moment et “verticale” entre les générations » (Maréchal et Quenault, 2005, p. 41).

Au delà de cette référence commune à la solidarité, on trouve dans l’économie solidaire et le développement durable un souhait d’associer à la fois des dimensions sociales, économiques, écologiques et démocratiques.

Ces concepts participent tous deux à la volonté de ne pas laisser se développer une économie ne prenant pas en compte les préoccupations sociétales contemporaines. Les difficiles jonctions entre ces deux notions sont en partie à rechercher dans leurs constructions différentes même si leurs racines se trouvent pour l’une comme pour l’autre dans les années 1970-1980. Le « développement durable » est apparu et a d’abord été diffusé à partir de conférences internationales et de discours politiques alors que « l’économie solidaire » s’est construite en premier lieu à partir d’initiatives locales, en partie reconnues par les pouvoirs publics.

Tout d’abord, les activités développées par les initiatives solidaires seront mises en évidence afin de présenter comment elles contribuent de manière concrète au développement durable, puis les liens et divergences entre l’économie solidaire et, le concept proche d’économie sociale seront éclaircis, afin de préciser, enfin, la spécificité des dimensions économiques, politiques et sociales de l’économie solidaire.

Commerce équitable, services de proximité, finance solidaire, régies de quartier, restaurants interculturels, crèches parentales, systèmes d’échange local, réseaux d’échanges réciproques de savoir…Les initiatives solidaires se situent aussi bien sur de nouvelles activités, que dans le champ de l’insertion ou encore des nouvelles formes d’échange (Gardin, 2006) "Les initiatives solidaires. La réciprocité face au marché et à l’État". Editions Erès, octobre 2006.. Leur présentation générale est accompagnée de renvois vers des sites des initiatives elles-mêmes ou de leurs réseaux.

Apparu dans la première moitié des années 80, le concept de services de proximité a été approché à partir des secteurs d’activités touchant aux fonctions domestiques, logement-habitat, restauration, transports, activités culturelles et sportives… L’émergence de ces nouveaux services s’expliquent à partir de l’analyse « d’un certain nombre de facteurs socio-démographiques [qui] devraient jouer dans l’avenir un rôle primordial dans l’évolution des services aux ménages ; ils devraient ainsi renforcer des demandes sociales - encore latentes très souvent - en modifiant les relations entre les individus, au sein de la famille ou en collectivité, leurs rapports aux temps sociaux (…) les rapports entre classes d’âge ». Ces facteurs repérés comme importants étaient : le vieillissement de la population, l’augmentation du nombre des personnes seules et des ménages monoparentaux, la progression du taux d’activité féminine, la croissance du temps libre, la montée des préoccupations écologiques (Eme et Laville, 1988, p. 41).

Au niveau européen, la Commission européenne (1995 ; 1996) a dégagé 19 domaines d’offre de nouveaux services dans 4 grands champs :

Ces quatre grands champs peuvent être analysés à partir du caractère individuel ou collectif des services rendus.

définition Définition

Pour les économistes, les services individuels sont des services dont la consommation est divisible, c’est-à-dire pour lesquels l’usager et sa consommation sont clairement identifiés ; en revanche, les services collectifs sont indivisibles parce que leur consommation est “non rivale” (la consommation du service par un individu n’entrave pas celle des autres) et “non exclusive” (il est impossible ou fort coûteux d’empêcher l’accès à ce bien à une partie de la population).
Une partie des initiatives développent bien des services collectifs, au sens traditionnel du terme, en particulier quand elles créent des services qui répondent à des problèmes environnementaux comme une meilleure gestion des ressources naturelles ou comme l’amélioration du cadre de vie sur les quartiers en difficulté, la mise en place d’activités de sécurité ou de médiation ou encore la gestion des espaces naturels. Aussi, les services considérés comme individuels questionnent la distinction opérée par la théorie économique. Certaines initiatives proposent des services qui, tout en étant individuel parce que leur consommation est divisible, n’en présentent pas moins des bénéfices collectifs valorisés par la collectivité ; en ce sens, il est possible de parler soit d’utilité sociale, soit de services quasi-collectifs.