Peu d’esprit critique
Le discours médiatique sur le changement climatique fait peu de place à l’esprit critique. Moins de 10 % des articles font référence à la variabilité naturelle du climat, et encore en reste-t-on le plus souvent aux cycles orbitaux de Milutin Milankovic et aux alternances glacaires/interglaciaires. Le pas de temps de l’histoire des sociétés (séculaire, décennal) est presque occulté au profit des temps longs de la planète, celui des milliers d’années. Et pourtant le réchauffement contemporain qui débute lors de la Révolution industrielle, il y a 150 ans, correspond mieux aux temporalités historiques qu’aux temporalités géologiques. Le 14 septembre 2006, J. C. Ribaut cite par exemple dans Le Monde les travaux de J. M. Chevet de l’INRA « qui vient d’étudier l’évolution du climat du Médoc sur la période 1800-2005… Sa conclusion est … que le Bordelais a connu entre 1865 et 1875 une période au moins aussi chaude que celle de la décennie écoulée ». Pourtant l’article est intitulé : « Le vin face au réchauffement – Devra-t-on dans 10 ou 20 ans envisager une modification radicale de l’encépagement ? Les périodes de canicule à répétition le font craindre ». Les auteurs peinent à reconnaître la nature changeante du climat et, quand ils le font, ils insistent sur la spécificité actuelle, à savoir la rapidité. Une hausse comme celle des 150 dernières années n’est peut-être pas aussi exceptionnelle si on accepte de reconnaître que les méthodes des sciences dures peinent à trouver des repères précis pour des variations de températures du passé à l’échelle de temps de la décennie, voire du siècle. D’ailleurs, peu d’articles traitent explicitement des techniques de reconstitution des climats passés : celui de B. Cot sur la palynologie dans L’express de Juillet 2005 fait figure d’exception.